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Dr Boris Houenou à propos de l’Eco : « L’avenir de la monnaie dépend… »

 Dr Boris Houenou à propos de l’Eco : « L’avenir de la monnaie dépend… »

L’ECO sera-t-il un jour la monnaie unique de toute l’Afrique de l’Ouest ou ne restera-t-il au mieux qu’un avatar du franc CFA ? Dans  cet entretien, Docteur Boris Houenou, Economiste de renom et observateur des dynamiques politiques, sociétales et économiques sur le continent africain, s’est prêté volontiers à nos questions. Lisez plutôt !!!

Prenez-vous vraiment l’ECO comme ”nouvelle monnaie ” à venir ?

Cela dépend de laquelle des ECO dont nous parlons. La transformation du CFA en ECO n’est stipulée dans l’accord révisé que dans le préambule. Ainsi, je ne saurai affirmer quand nous verrions des billets estampillés “ECO” en circulation dans l’UEMOA. La décision d’adopter ou de changer un nom a certes été entérinée par chefs d’État de la région, mais sa mise en œuvre prendra des années. En revanche, si vous parlez de l’ECO de la CEDEAO, je pense que c’est possible, mais je ne peux pas prédire à quel horizon.

Qu’est ce qui empêche la réalisation de ce projet ?

De l’avis de nombreux observateurs, le projet de l’ECO de la CEDEAO rencontre des obstacles en raison de la réticence du Nigeria, des asymétries des chocs économiques et de leurs mécanismes d’absorption dans les pays de la CEDEAO. Ainsi, la quête de la convergence macroéconomique comme condition sine qua non à l’avènement de la monnaie devient un défi de taille. J’ai personnellement travaillé sur cette question, analysant les rapports successifs sur la convergence macroéconomique et modélisant leur similarité dans le temps. Je suis parvenu à la conclusion que la recherche de la convergence macroéconomique comme préalable non négociable pour un projet à la fois économique, politique et social, tel que la création d’une monnaie commune, est une simplification excessive qui entrave la réalisation du projet. Cependant, je reste optimiste quant à une accélération de l’intégration commerciale entre les pays africains. Par exemple, si la Zone Libre Échange Continentale Africaine (ZLECA) réussissait, cela pourrait fournir peu de raisons au leadership pour tergiverser. Parfois, les facteurs qui accélèrent un événement ne se trouvent pas dans les plans.

L’accord actuel ratifié par le Bénin parle principalement de : l’arrêt de la centralisation des réserves de changes au Trésor français ; le transfert de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest des ressources disponibles dans le compte d’opération et de fermeture dudit; et, le retrait de tous les représentants français des organes de décision et de gestion de l’UMOA… Peut-on affirmer que ce sont des avancées significatives pour la zone ?

Sur la question des symboles, je pense que l’accord révisé apporte une forme de réponse. Cependant, la question est de savoir si ce que les jeunes de la zone UEMOA demandent à leurs dirigeants relève du simple symbole ou s’ils attendent un engagement politique plus fort, voire une refonte complète. Je n’ai pas la réponse à cette question. Dans une forme plus avancée de ces réformes, j’aurais aimé voir davantage d’écoute. Une réforme sans écoute est une demi-réforme. Il m’a semblé que la partie française a organisé une évaluation de cet accord, a commissionné un groupe d’experts pour un rapport éclairant pour le législateur, puis a organisé un débat pour discuter des intérêts français dans cet accord révisé. Si la France le fait avec autant de civilité démocratique et de concertation, combien est-il plus important pour les pays où les peuples détiennent et utilisent cette monnaie d’organiser un débat plus large, structuré, mais ouvert à l’écoute, afin d’amorcer une lecture plus approfondie de la volonté et des critiques émanant des non-engagés, des défenseurs, des experts et des non-experts sur cette question.

Nous devons faire l’effort d’évaluer ex-ante toute réforme avant de les implémenter, surtout dans un contexte de ressources limitées où nous sommes appelés à ne pas apporter des ajustements qui pourraient ne pas répondre pleinement à la volonté du peuple. Cependant, un ajustement, une sorte de verre à moitié rempli, peut indiquer le chemin dans la bonne direction. En général, le peuple, dans toute négociation, notamment avec des acteurs extérieurs, devrait être perçu comme le bouclier du leadership. Nous oublions souvent cela. Comme je l’ai précisé plus haut, il n’est pas si difficile de comprendre ce qu’est une monnaie et, qui, à cause de sa dimension sociale, politique et économique, requiert que les peuples autant que possible aient une place autour de la table.

Quels seront les changements probables à l’avantage des peuples ?

Comme je l’ai mentionné précédemment, les fondamentaux de la monnaie restent inchangés. Ainsi, les performances de la zone en ce qui concerne le mandat de la BCEAO devraient perdurer. Cela inclut notamment la maîtrise de l’inflation, un paramètre dans lequel le CFA se comporte plutôt bien en comparaison avec le reste de la sous-région. De plus, la stabilité du cadre économique est assurée notamment grâce à la stabilité de la devise, l’euro, avec laquelle la parité fixe est maintenue. Ainsi, dans un contexte inflationniste, comme celui observé par exemple au Ghana ou même au Nigeria, le CFA se positionne comme un refuge, ce qui constitue certainement un atout.

Les inconvénients sont bien connus et largement débattus. Je ne vais pas y revenir ici. Étant donné que la monnaie revêt également un aspect identitaire et de souveraineté, je vous renvoie aux débats passionnés et critiques à ce sujet. Vous n’aurez pas besoin de beaucoup de temps pour les entendre.

Que dites-vous globalement de l’avenir de cette monnaie ?

Il a fallu attendre 46 ans pour voir une révision de l’accord de 1973. Je ne sais pas quand aura lieu la prochaine révision, mais elle n’est pas improbable. L’avenir de la monnaie dépend des dynamiques internes de l’UMOA, mais aussi au sein de la CEDEAO, sans oublier la France. Cependant, c’est surtout une décision politique, donc difficile à prédire. Personne n’aurait par exemple imaginé que les critiques de l’accord de 1973 pourraient déclencher une série d’événements qui ont conduit à l’accord révisé du 21 décembre 2019. Néanmoins, j’ose émettre une prédiction : l’accord révisé ne durera pas aussi longtemps avant d’être cédé ou révisé, si les critiques ne sont pas apaisées.

Un mot pour conclure

Je conclurai par un vœu : celui de voir un jour une monnaie qui reflète véritablement la volonté des populations, dans le cadre d’une réforme attentive et à l’écoute de leurs besoins et de leurs aspirations.

Réalisation : Damien TOLOMISSI

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