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“La débandade du conseil de famille !” : Un texte de Jules C. Agboton (1ère partie)

 “La débandade du conseil de famille !” : Un texte de Jules C. Agboton  (1ère partie)

Exactement trois semaines après la mort de mon père, la famille tint conseil dans le jardin de notre maison. Nous étions tenus à l’écart des débats jusqu’à ce que l’oncle Jonas vînt nous chercher en hurlant à la fois des ordres et des menaces mal articulés.

– Votre père de son vivant, n’aidait personne. Il n’écoutait personne non plus. S’il avait été habité par une once, je dis bien, une seule once de bon sens, il serait encore en vie aujourd’hui ! Vous êtes bien sûr innocents de sa malfaisance mais tant pis pour vous, vous allez néanmoins en payer le prix. Votre mère avec ! Elle l’a souvent soutenu et même qu’elle l’avait dressé contre nous, sa famille !

Mon frère aîné ouvrit la marche derrière lui, ma sœur et moi suivions en silence et dubitatifs. Personnellement, je n’arrivais pas à comprendre ce pourquoi cet oncle si proche de papa de son vivant, parlait de lui en ces termes après sa mort. Je n’avais encore aucune réponse à mes interrogations quand nous parvînmes à la réunion de famille.

Ma mère était prostrée sur une petite natte à même le sol en face de la famille disposée en demi-lune. Il y avait là, dans l’assistance, quelques personnes que nous n’avions jamais vues. Peut-être, des membres de la grande famille dépêchés du village pour l’occasion.

Je remarquai de jeunes pousses de cheveu sur le crâne grossièrement rasé de maman lors des cérémonies du troisième jour après l’inhumation de mon père. Je la dévisageai furtivement et pus noter à l’expression de sa mine une très profonde détresse que le deuil qui nous frappait ne pouvait seul justifier.

Nos oncles nous firent signe de prendre place à côté de notre maman. Je jetai encore un regard à la natte et compris qu’ils nous invitaient plutôt à nous asseoir par terre. Ce que nous fîmes sans rechigner. Pendant que l’assistance observait encore un lourd silence, je passai le temps à observer de très près ma mère. En si peu de jours, elle avait considérablement vieilli, son visage était labouré  de profondes rides que je n’avais jamais vues auparavant. Quand elle leva enfin ses yeux vers nous, je constatai qu’elle avait encore beaucoup pleuré et ne pus retenir mes propres larmes. J’en détestai mes oncles et déplorai mon impuissance face au traitement qu’ils infligeaient à maman depuis la mort de notre papa.

– Votre père est mort ! Oui, il est mort mais nous on est là ! Comme on le dit chez nous, la mort ne frappe pas tout le monde à la fois dans une famille. Certains meurent et d’autres restent ! C’est le cas ! Votre père est mort et nous, nous sommes vivants ! C’est pourquoi nous sommes réunis ici pour décider de sa succession. C’est notre frère. Nous avons par conséquent la légitimité de procéder ainsi.

Ces propos étaient débités d’un trait par l’aîné des frères de papa avec une gêne assez perceptible de tous. Tonton Gaby, comme ils exigeaient que nous l’appelions n’était pas à son aise. Je pensai qu’il remplissait sans réelle conviction une mission que les autres lui avaient confiée.

Après cette brève introduction, il laissa la parole à un des hommes venus du village qui réajusta à plusieurs reprises le boubou qu’il portait directement sur une culotte coupée dans une toile de qualité douteuse (A suivre…)

Bout de nouvelle (fiction)

28 mai 2022

Jules C AGBOTON

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