Vie de couple d’une sportive : Témoignages

Une passion dévorante, l’envie de surpasser ces performances actuelles, l’intensité accrue  des entraînements, les voyages à mille lieux pour des compétitions. Le sport demande pour la personne qui en fait un métier une exigence pointue et particulièrement pour la femme des sacrifices à se saigner aux quatre veines. La vie de famille, les responsabilités,  les enfants, le conjoint, et tout ce qui va avec.

Les performances, les statistiques de nos jours sont de plus en plus le but ultime de toutes les sportives. Dans cette course, la tâche pour les femmes qui pratiquent le sport et qui sont en couple et ont une vie de famille peut s’avérer comme la pierre de Sisyphe ou parfois totalement relaxe. Bachiratou  Adom, ancienne volleyeuse, mère et marié pendant sa carrière professionnelle de volley-ball à laquelle elle a mis fin la saison écoulée confirme que ce n’est pas aisé de s’en sortir. « En tant que célibataire,  c’est beaucoup plus facile de concilier sport et relation amoureuse. Mais quand on a des enfants,  c’cela impose plus de responsabilité. Car en tant que mère,  il faut apprêter les enfants, les amener à l’école, préparer, les nourrir, faire les  activités professionnelles. Une évidence qui prouve que ce  n’est pas du tout facile », a-t-elle expliqué.

La bodybuildeuse béninoise championne en titre, mariée et mère de deux enfants,  Jocelyne Firmine Adjohou confie qu’au tout début elle boudait en faisant les tâches ménagères tellement l’alchimie a été difficile à trouver : « Dans le ménage, je commence par bouder. Je me vois au four et au moulin ce qui m’amène à bouder, à dire des propos déplacés. Je me retrouve parfois dans les faits accomplis. Je n’arrive pas à faire telle tâche à temps. C’est ainsi que j’ai commencé à me poser des questions. Comment faire pour concilier les deux ».

Contrairement aux deux premières, Emmanuelle Zinsou, footballeuse évoluant à Aïnonvi FC,  et mère de deux enfants, n’a eu aucune difficulté. « Pas du tout difficile. Pour m’en sortir, j’ai ma maman et ma belle-mère qui m’aident à garder les enfants quand j’ai un match ou des sorties », a-t-elle lâché toute souriante.

La communication, élément essentiel

Pour Mélanie Hindi, psychologue spécialiste du sport, l’une des clés réside dans la communication. Et cette thèse Bachiratou Adom ne la réfute guerre. « La première démarche, c’est déjà discuter avec son époux, lui faire comprendre que les choses ont changé et qu’on aura à trouver le juste milieu pour que tout marche. Les enfants, s’ils sont grands c’est plus facile de discuter avec eux. Mais quand ils sont encore petits, il faut trouver la personne formidable qui peut prendre soin d’eux aux heures des matchs et d’entraînements », a-t-elle dit en ajoutant « L’époux doit jouer un rôle primordial mais tout part de la communication et de la compréhension. Il m’est arrivé plusieurs fois d’amener mes enfants aux séances d’entraînement et à suivre certains de mes matchs. Cela fait toujours plaisir lorsque tu jettes un coup d’œil dans la tribune et tu vois tes amours te font un clin d’œil ». De son côté, Jocelyne Adjohou, a misé sur une structuration de son emploi du temps pour pouvoir s’en sortir. « Les weekends sont pour moi donc je me suis dit si j’arrivais à mettre le paquet quand je suis au repos, cela pourrait m’aider à concilier les deux. Et c’est de là que j’ai commencé à m’organiser plus. Je ne peux pas me donner un point de 10/10, mais j’arrive à être dans les gammes aujourd’hui. C’est difficile! Mais le dialogue avec son homme demeure la clé », a-t-elle indiqué.

Dans son carquois, Emmanuelle Zinsou détient une arme redoutable qui l’aide à s’en sortir à part sa maman et sa belle-mère, son cher et tendre époux : « D’abord il m’aide beaucoup dans le ménage. Si je finis les matchs et je reviens, c’est lui qui s’occupe des enfants. Il prépare à temps avant que je ne revienne. Une fois à la maison, je mange avec mes enfants et on collabore, puis la vie continue. Je suis tombé sur l’homme idéal (Sourire) ».

Malgré tout, la difficulté ne disparaît point

Le sport permet de voyager pour aller compétir sur d’autres fronts face à des adversaires parfois dont le niveau est plus élevé. Concourir dans cette aventure est le rêve de toutes les sportives. Et pourtant ce n’est pas la mer à boire avoue Bachiratou Adom quand on a une vie de famille.  Elle se raconte : « Ce n’est pas facile du tout! Je me rappelle de mon avant dernière expérience en 2022, où on allait à Ouagadougou pour la Coupe d’Afrique des clubs champions de la zone 3 avec Allada VBC. C’est vrai que ça n’avait pas été facile que mon époux accepte mais j’ai trouvé les mots justes  pour lui faire comprendre que cela contribue à mon épanouissement et à celui du couple. À la dernière minute, il a quand même accepté. C’est pour dire que c’est vrai que ce n’est pas facile que les époux acceptent notre statut sportif surtout que nous sommes dans une société africaine où on a une belle famille et le regard de la société. Ce qui a un impact sur nos époux, on trouve les mots pour les convaincre. Pour ma toute dernière expérience qui date d’un mois, j’étais allée à un stage d’entraîneur niveau 1 à Niamey. C’est vrai qu’il n’était pas au pays lui aussi et pour les enfants, ça n’a pas été facile. Quand j’appelle, ils pleurent, on est arrivé à quand même concilier les deux. On a la chance de les écouter et discuter grâce aux téléphones, on peut effectuer des appels vidéos et les rassurer ». Quant à Emmanuelle Zinsou, « Mon mari n’a rien contre cela puisqu’il est dans le domaine du sport » clarifie-t-elle. « Il a déjà tout accepté sinon il n’allait pas me laisser dans ce domaine footballistique quand j’ai fait des enfants. Il était content pour les voyages puisqu’il est un acteur de football »

Le choix de l’époux dira Bachiratou Adom est très important pour la vie. « Ce n’est pas seulement pour les sportives. Quand la femme a un mari qui peut l’épauler dans ses projets, elle est bien partie. Mais si elle fait un mauvais choix, c’est gâté », a-t-elle martelé.

Éprouver un pur et authentique amour pour le sport, et en faire son métier, c’est bien. Mais lorsque la pratique empiète sur sa relation de couple, le déchirement est parfois inévitable. Les clés? La communication, la planification, la complicité,  la compréhension du conjoint et des enfants.

Léonard SONEHEKPON (Coll)