Après son K.O : Talon ne doit rien à personne

De façon opportuniste, des acteurs politiques sont déjà nombreux à revendiquer la paternité du K.O du duo Patrice Talon et Mariam Chabi Talata à l’élection présidentielle du 11 avril dernier. Mais en en réalité, ce dernier ne doit rien à personne. Sa victoire est le résultat d’une planification savamment exécutée.

“L’échec est orpheline mais le succès a plusieurs pères”, dit-on souvent. Les semaines qui viennent seront encore plus ponctuées de déclarations tous azimuts, comme pour rappeler au président Talon qu’il leur doit un poste dans le prochain gouvernement. Mais en vérité, Talon n’a jamais eu besoin de tous ces courtisans.

Depuis plus de cinq ans, il avait déjà dévoilé sa stratégie de conquête du second mandat. Tel un renard dans les contes, le président Talon s’est révélé au fil des ans comme un animal politique qui a plus d’un tour dans son sac, au grand dam de ses adversaires qui, selon les apparences, ne savent plus à quel saint se vouer. Une nouvelle école politique, celle de l’anticipation et d’une planification intelligente.

Le secret du chantre de la Rupture est bien simple. Fin stratège, il a su anticiper en mettant en place des réformes en apparence anodines mais qui se révèlent être des atouts en sa faveur. Tout commence par la création de deux partis politiques à savoir le Bloc républicain et l’Union progressiste. Beaucoup se demandaient à l’époque pourquoi deux formations politiques au lieu d’une seule comme cela se fait partout. Mais c’était sans savoir que ces derniers devraient donner aux observateurs l’impression que le parlement n’était pas monopartite. En effet, seuls ces partis furent autorisés à participer aux législatives après une réforme du système partisan les favorisant surtout après le refus des partis politiques de se conformer à la nouvelle charte des partis politiques.

Seuls maîtres à bord à l’Assemblée nationale, ces députés ont enfin permis au président Talon de réaliser son rêve de révision de la constitution. Avec cette réforme, la voie était désormais balisée pour réduire le nombre de candidats aux différentes élections notamment l’élection présidentielle. En effet l’une des conditions pour participer à cette compétition est de disposer d’au moins 16 parrains, qu’ils soient députés ou maires. Condition sine qua non à remplir par tout autre candidat avant  d’être sur la ligne de départ de la course au Marina. Grâce à cette initiative, le chef de l’Etat a réussi à récupérer un grand nombre de politiciens qui soutenaient l’ancien président Yayi Boni.

Sa force, c’est aussi son histoire. Il créé en 1985 la Société de distribution inter-continentale (SDI), qui fournit des intrants agricoles aux producteurs de coton. Dans les années 1990, il fait fortune en gagnant le marché d’implantation de trois usines d’égrenage de coton au Bénin, ce qui fera de lui un acteur incontournable du secteur. En politique, il a été le soutien de nombreux hommes forts de la politique béninoise. Il est persuadé d’avoir un destin. Et malgré la pression, il est capable de rester calme, posé, lucide… De plus, il propose une vision du changement basée sur la réforme.

Dans ce contexte, toute tentative de récupération de la victoire au scrutin présidentiel ne peut qu’être infructueuse. Une fois officiellement réinstallé dans son fauteuil, le chef de l’Etat peut, en toute légitimité, associer qui il veut à la gestion du pouvoir. L’expérience ayant montré que les courtisans n’ont généralement rien à apporter, le président Talon peut encore surprendre tout le monde en s’ouvrant à l’opposition pour décrisper la situation politique. 

LA REDACTION