Présidence de la République: Qui pour succéder à Talon?

Qui pour succéder à Patrice Talon à la tête de la République du Bénin ? La lutte est ouverte après des législatives remportées en janvier 2023 par les partis de la mouvance présidentielle.

Patrice Talon réussira-t-il à imposer un de ses hommes à sa succession en 2026 comme l’ancien président Yayi Boni a tenté sans succès de le faire dix ans plus tôt ? La courte histoire de la démocratie béninoise a montré qu’à chaque alternance à la tête de l’Etat, c’est un outsider qui est plutôt élu en lieu et place des hommes politiques « Fabriqués » par le président sortant. Nicéphore Soglo, Mathieu Kérékou II, Yayi Boni et même Patrice Talon ont été tous en leur temps des gens de la rupture. A chaque fois, les électeurs ont préféré des acteurs politiques neufs ou qui se sont refait une virginité.

La question de la succession se pose en ces termes lorsqu’on sait qu’en dépit des tentatives pour empêcher le parti Les Démocrates de déposer sa liste aux législatives de janvier dernier, celui-ci a réussi à s’imposer comme un acteur non négligeable au Parlement. Désormais donc, pour l’élection présidentielle, le ou les candidats issus de ses rangs n’auront aucun problème pour obtenir les parrainages indispensables pour ce scrutin. Dans ces conditions, il n’est pas impossible qu’un opposant ou qu’un candidat soutenu par l’opposition réussisse à bouleverser les cartes de la mouvance présidentielle.

Du côté du président Talon, nombreux sont ceux qui pourraient être positionnés comme dauphins. Au nombre de ceux-ci, celui que d’aucuns appelaient le « vice-président » avant que le Bénin ait une véritable vice-présidente. Il s’agit de Olivier Boko, un homme d’affaire très discret voire secret et sur qui peu de Béninois sont capables de donner d’autres détails à part son nom et sa légendaire amitié avec Patrice Talon. Une amitié qui est antérieure à l’accession de ce dernier au sommet de l’Etat et qui semble n’avoir pas pris de coups malgré l’exercice du pouvoir, sans doute parce que Olivier Boko n’a jamais joué un rôle officiel auprès de son ami. Seulement, son handicap est d’apparaître comme un sosie du président Patrice Talon. Les électeurs béninois vite lassés de voir la même personne les diriger pourraient d’office l’écarter de leur choix le jour du vote.

Parmi les amis de première heure du président Talon qui pourraient prétendre à son siège figurent Johannes Dagnon, lui aussi resté très discret, et le jeune Romuald Wadagni, Ministre des finances depuis 2016. Mais il n’est pas certain que le choix du chef de l’Etat se porte sur l’un d’eux étant donné qu’ils viennent en seconde position en termes de proximité affective et de pratique dans les affaires.

Dans le cercle plus élargi, Joseph Djogbénou apparaît comme l’homme qui a réussi à gagner la confiance du président. Plus jeune et ambitieux, il avait déjà une longue expérience d’acteur de la société civile et de défenseur des droits des personnes politiquement brimées. Il avait surtout amorcé une ascension politique en réussissant à décrocher un siège au Parlement et le poste de président de la Commission des lois de l’Assemblée nationale avant 2016. Très vite, il a abandonné ses ambitions personnelles pour se mettre entièrement au service du candidat Patrice Talon dont il est par ailleurs devenu l’avocat personnel.

Comme récompense à sa fidélité et comme signe de confiance, il fut tour à tour ministre de la Justice et président de la Cour constitutionnelle. Il a surtout accepté de démissionner de ce prestigieux poste pour redevenir simple député. Cette démission est d’ailleurs perçue par des observateurs comme étant une manière pour le chef de l’Etat de faire de lui le président de l’Assemblée nationale d’où il pourra facilement devenir président de la République.

La liste de ceux qui rêvent est certes longue, mais au sein de la mouvance, les personnalités citées ci-dessus sont les seules qui peuvent raisonnablement espérer être choisies pour la succession au palais de la République. Mais qui sait ?

Pierre MATCHOUDO