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Bayanin 'yan kasar game da yaki da ta'addanci a Benin : Babbar dabara

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“Le terrorisme au Bénin : perceptions, actions et perspectives “. Un ouvrage écrit par Afouda Vincent Agué, Estelle K. Djanato, Emmanuel Odilon Koukoubou sous la direction de Thierry Sédjro Bidouzo et Expédit B. Ologou avec le soutien de Friedrich Ebert Stifung (FES). Préfacé par Docteur Iris Nothofer, Représentante Résidente de la FES au Bénin, ce joyau intellectuel de 271 pages, Christon Editions, a pour objectif de l’étude est de mener une recherche scientifique pour étudier les implications sociopolitiques, économiques et sécuritaires de l’extrémisme violent sur les acteurs locaux des zones touchées et/ou exposées au phénomène, documenter et analyser les perceptions et les initiatives des dits acteurs face à l’extrémisme violent/terrorisme et esquisser une architecture locale de lutte contre le phénomène terroriste au Bénin. Dans ce numéro, nous avons décidé de partager le texte concernant les renseignements citoyens dans la lutte contre le terrorisme au Bénin écrit par Expédit B. Ologou.

Lallai, selon l’auteur, l’implication des civils dans la production et la gestion du renseignement d’Etat est aussi vieille que l’activité du renseignement elle-même. C’est pourquoi dans cette lutte contre le terrorisme, le citoyen devient un acteur, un agent et donc un allié informationnel pertinent et stratégique pour le dispositif de lutte contre ce mal.  

La figure plurielle de l’agent de renseignement citoyen

Avant tout, il est nécessaire de faire la différence entre celui que nous nommons ici l’agent de renseignement citoyen et l’agent civil des services de renseignements de l’Etat. Les deux sont des civils, mais le premier est un occasionnel, même pas un amateur, tandis que le second est un professionnel, qui fait profession et corps d’agent de renseignement intégré au dispositif de l’Etat. Il est courant que l’agent citoyen de renseignement, en raison des circonstances, opère une mutation et devienne un agent intégré aux services étatiques de renseignement. L’agent citoyen le fait par devoir citoyen; l’agent professionnel vit matériellement de la production du renseignement.

L’agent naïf

L’agent de renseignement citoyen naïf est un réservoir d’informations utiles à disposition de ceux qui savent en tamiser le contenu et en extraire la substantifique moelle. Mota, l’agent naïf sait peu de la finalité de son action de renseignement. Il fournit des renseignements aux autorités administratives, politiques et sécuritaires mais il ne se préoccupe pas de l’utilité ni de l’usage des informations qu’il livre. Le prototype de l’agent naïf est celui du genre que décrit un acteur local: « Eux, ils te disent seulement ce qu’ils savent mais ne creusent pas. Ils te parlent juste et s’en vont ou bien ils parlent d’un autre sujet du village avec toi, et ils repartent ». L’agent de renseignement citoyen naïf se sent juste en devoir de fournir des informations fiables et sans se préoccuper de sa responsabilité ultérieure. Le naïf est la matière première de la chaîne de production du renseignement. Le contenu de l’information est souvent brut, sans filtre, à la limite désintéressé. L’agent naïf transmet l’information telle que découverte ou reçue. Il est dépourvu d’intentions et de capacités manipulatoires du renseignement reçu puisqu’il n’est pas particulièrement informé de tous les enjeux attachés à l’information en sa possession. A gaskiya, il ne cherche pas l’information avant de l’avoir trouvée ou découverte. Il ne se préoccupe pas non plus de l’analyser outre mesure. C’est un honnête citoyen qui a internalisé le devoir d’informer sur des actes et paroles inhabituels ou suspects. C’est le prototype du citoyen loyal, le plus sûr, le moins complexe de tous les agents de renseignement citoyen avec lequel les autorités coopèrent le plus facilement. « Ils sont généreux, ils vous donnent des pistes auxquelles vous n’auriez jamais songé, mais ils n’ont pas toujours le réflexe de creuser si bien qu’après deux ou trois d’approfondissement, vous êtes bloqués. Mais au moins, ça vous met sur des pistes très intéressantes ».

L’agent de renseignement citoyen naïf est aussi le citoyen banal, c’est-à-dire un citoyen superficiel, sans profondeur de pensée, en tout cas à propos de l’objet du renseignement. La figure typique de cet agent naïf et banal est le citoyen alcoolique errant. Il passe de cérémonies en cérémonies « pour boire seulement, jusqu’à ce qu’il ne soit pas capable de marcher et de rentrer chez lui »183. Parce qu’il est comme dépourvu de ses facultés rationnelles, l’agent de renseignement citoyen naïf « n’est pas considéré comme une menace et donc on parle en sa présence sans précautions; et lui, il capte beaucoup d’informations » que divers acteurs, dont en priorité les autorités locales, savent récupérer et exploiter. Dans ces conditions, l’éthylisme, qui était déjà un problème de santé publique185, devient, d’une part, un piège pour les indélicats qui s’expriment imprudemment mais, a wannan bangaren, une ressource précieuse d’attraction et de captation de renseignements. L’alcoolique errant se mue en une figure de la filature errante au bénéfice du renseignement anti-terroriste.

L’agent missionnaire

L’agent missionnaire de renseignement citoyen est un citoyen qui a une haute idée de la fourniture des informations au dispositif étatique de sécurité. Il croit profondément que c’est une mission républicaine, patriotique voire divine pour lui d’appuyer, par l’information utile et pertinente, l’Etat à lutter contre les terroristes. Ces agents missionnaires de renseignement citoyen ne sont pas nombreux. Un fonctionnaire d’un arrondissement d’une localité du Nord-Ouest du Bénin parlait avec admiration et profond respect de certains de ses concitoyens dévoués, désintéressés et disponibles qui « sont prompts, honnêtes et qui vous donnent des informations souvent vraies: Wani lokaci, il y a parmi eux des jeunes qui normalement ne sont pas censés avoir ce niveau de conscience, de compréhension de ce qui se passe; ils te parlent et te demandent d’aller creuser ça, mais que eux ils pensent qu’il y a quelque chose là…. »

Ces citoyens missionnaires du renseignement ont une principale faiblesse. Le zèle qui caractérise leur action expose aussi bien eux-mêmes que tous leurs interlocuteurs sur la chaîne de renseignement. Lallai, ils ne sont pas assez précautionneux de se protéger, d’être discrets et ils semblent n’avoir point peur des représailles. Ils sont prêts à aller vers leurs congénères pour les sensibiliser sur les enjeux et conséquences du phénomène terroriste Ce ne sont pas des personnes agitées, mais ce sont des personnes relativement passionnées, parfois révoltées, ou simplement habitées du désir missionnaire de barrer la route à « ces gens-là ». La figure emblématique du citoyen missionnaire est celle d’un homme, quarantenaire, d’une localité du Nord-Est du Bénin qui postule : « Nous ne devons pas avoir peur d’eux; si nous commençons à avoir peur, ils ont déjà gagné; moi j’agis comme j’agis pour qu’ils sachent que nous sommes prêts, que nous sommes aussi prêts de mourir comme eux que nous sommes aussi fous, sinon plus fous qu’eux… ». Il postule en fait un certain équilibre de la terreur ou plutôt un équilibre de la peur. Les citoyens missionnaires du renseignement sont en quelque sorte des fous du renseignement anti- terroriste. Leur zèle et leur folie sont des épées à double tranchant à propos desquelles sont très précautionneux les acteurs du dispositif de sécurité étatique.

L’agent allié

L’agent de renseignement citoyen (ARC) est un allié du dispositif étatique de renseignement. Il est un allié en ce qu’il est perçu, traité par les Forces de défense et de sécurité comme un acteur avec qui il faut nécessairement travailler, collaborer pour être efficace face à l’ennemi ce sens, selon les enquêtés, l’agent de citoyen allié est un moyen, un des sûrs entre la réflexion stratégique et renseignement L’approche du terrain. L’ARC allié est un citoyen qui ne revendique pas le statut d’agent de renseignement professionnel mais qui est considéré et traité comme tel, et parfois bien plus que cela, par le dispositif étatique de sécurité. L’ARC allié a conscience qu’il a une telle valeur et le rend bien à son allié. Il dispose notamment des atouts d’efficacité, de discrétion voire de secret, d’analyse contextuelle poussée. Des citoyens, il est la figure la plus proche de l’agent de renseignement professionnel.

Tout comme l’agent missionnaire, l’agent de renseigne- ment citoyen allié a une conscience aiguë de son rôle. II connaît la finalité et l’utilité de son action. Il en maîtrise les subtilités, les écueils et les périls. A l’inverse du missionnaire, il n’est ni un obsédé ni un zélé encore moins un téméraire bouché à l’émeri. Sa principale caractéristique, c’est le culte ou plutôt la praxis du secret. C’est le dernier dans la communauté duquel on penserait qu’il commercerait avec le dispositif étatique de sécurité et de Jute contre le terrorisme. A l’opposé de l’agent de renseignement citoyen naïf, l’agent de renseignement citoyen allié est stratégique, fin connaisseur des enjeux à l’œuvre, de ses intérêts, de ceux de la communauté locale et nationale. C’est en somme le plus rationnel des citoyens conviés à l’œuvre de renseignements anti-terroristes. Rationnel mais surtout froid et futé. Il a un avenir: celui d’un agent professionnel de renseignement.

Certains des citoyens qui ont ces caractéristiques de l’ARC allié ont affirmé, au cours de nos enquêtes, n’avoir aucune envie de devenir des professionnels recrutés des services étatiques de renseignement. La plupart affirment ne pas avoir le temps nécessaire pour exercer pleinement en tant qu’agent professionnalisé ou encore ne pas être sûrs, en le devenant, d’être aussi libres qu’ils le sont maintenant. A gaskiya, l’ARC allié est dans un entre- deux: le citoyen et le professionnel. La liberté à laquelle les ARC alliés tiennent autant est liée au bénévolat de leur action. Parce que ne bénéficiant ni ne revendiquant aucune rémunération pécuniaire de l’Etat pour produire l’information anti-terroriste, les ARC alliés se sentent armés d’une autonomie et d’une distance hygiéniques vis- à-vis du dispositif étatique de sécurité. Ils ne se sentent pas tenus aux mêmes contraintes professionnelles que les agents de renseignement professionnel.

Damien TOLOMISSI

Labarai iri daya