Talon et Yayi : Vers une alliance inédite ?

 Talon et Yayi : Vers une alliance inédite ?

Lors d’une récente interview accordée à Jeune Afrique, le président béninois Patrice Talon a surpris plus d’un en déclarant : « Je n’ai aucun problème personnel avec l’ancien président Boni Yayi, et je ne pense pas qu’il en ait avec moi de nature à ce qu’il veuille se venger. Peut-être nous retrouverons-nous autour du même choix, qui sait ? » Ces propos, bien que prudents, laissent entrevoir un scénario qui aurait semblé improbable il y a encore quelques années : un rapprochement entre les deux hommes autour d’un candidat commun pour la prochaine élection présidentielle.

L’histoire politique du Bénin a souvent été marquée par des alliances inattendues. Les rivalités ne sont jamais figées, et les intérêts du moment l’emportent souvent sur les rancœurs passées. L’exemple de Me Adrien Houngbédji en est une parfaite illustration. Condamné à mort sous Mathieu Kérékou, il a pourtant contribué à la candidature de ce dernier lors de la présidentielle de 1996.  De même, Patrice Talon et Boni Yayi ont eux aussi connu des relations contrastées. Alliés durant le premier mandat de Yayi, Talon a joué un rôle majeur dans son accession au pouvoir en 2006 avant que leur amitié ne se transforme en affrontement à la fin du second quinquennat de Yayi. Depuis, les tensions ont été vives, mais comme l’histoire l’a déjà prouvé, les lignes peuvent bouger rapidement. 

Les raisons d’un possible apaisement 

Plusieurs éléments plaident en faveur d’un apaisement entre Talon et Yayi. D’une part, Patrice Talon arrive en fin de mandat et a affirmé à plusieurs reprises qu’il ne briguerait pas un troisième mandat. Il n’a donc aucun intérêt à maintenir une guerre d’usure contre son ancien allié. S’il veut préserver son héritage et garantir une transition maîtrisée, il pourrait être tenté de négocier avec les différents acteurs politiques, y compris Boni Yayi et son entourage. 

D’autre part, Yayi Boni, désormais leader du parti d’opposition Les Démocrates, sait que la prochaine présidentielle sera déterminante pour la survie politique de son camp. Face à un régime qui a consolidé son pouvoir ces dernières années, il pourrait trouver un intérêt stratégique à s’entendre avec Talon, ne serait-ce que pour influencer le choix du prochain dirigeant du pays. 

Un candidat consensuel en vue ?

Si une telle alliance venait à se concrétiser, la question centrale serait celle du candidat qui pourrait satisfaire les deux camps. Talon, qui connaît bien l’entourage de Yayi, pourrait chercher une personnalité consensuelle, capable d’assurer une transition en douceur tout en garantissant un équilibre entre les différentes forces politiques du pays. Certains noms pourraient émerger, notamment parmi les technocrates qui ont travaillé sous les deux régimes, ou parmi les figures politiques modérées capables de rallier à la fois le pouvoir actuel et l’opposition. L’objectif pour Talon serait de sécuriser ses réformes et de s’assurer que son successeur ne remette pas totalement en cause son bilan. Pour Yayi, il s’agirait de retrouver une influence au sommet de l’État et de préparer l’avenir pour son camp politique. 

Une ouverture, mais rien de certain 

Si la déclaration de Patrice Talon laisse entrevoir une ouverture, il est encore trop tôt pour affirmer avec certitude qu’un tel rapprochement est en cours. La politique béninoise est imprévisible, et les négociations en coulisses restent souvent opaques. Toutefois, les faits montrent que dans ce pays, les ennemis d’hier peuvent devenir les alliés d’aujourd’hui.  La prochaine élection présidentielle au Bénin s’annonce donc comme un moment clé, où les alliances pourraient redessiner le paysage politique. Et si Talon et Yayi parvenaient à s’entendre, cela marquerait un tournant historique dans l’histoire politique du pays. Ce qui est certain, les faits montrent que dans ce pays, les ennemis d’hier peuvent devenir les alliés d’aujourd’hui.

Damien TOLOMISSI

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1 Comment

  • Ça serait formidable

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