Seuil de 20 % des suffrages aux législatives: Une barrière infranchissable?

dav
Depuis la dernière réforme du code électoral au Bénin, une disposition particulière suscite une vive controverse au sein de la classe politique et de l’opinion publique : l’obligation pour tout parti politique de recueillir au moins 20 % des suffrages exprimés au plan national pour prétendre à l’attribution de sièges à l’Assemblée nationale. Une disposition jugée par beaucoup comme une mesure d’exclusion, voire d’étouffement de la pluralité politique.
Lors des élections législatives précédentes, le seuil requis était de 10 %. Même à ce niveau, certains partis politiques dont la FCBE et MOELE-Bénin n’ont pas pu franchir la barre. Résultat : aucun élu à l’Assemblée, malgré leur présence dans plusieurs départements du pays et une base militante encore active.
L’élévation de ce seuil à 20 % constitue donc un obstacle encore plus important. Plusieurs analystes politiques estiment qu’un tel taux est « irréaliste » dans le contexte politique béninois. Cela malgré le fait que le paysage politique s’est dépouillé d’une multitude de petites formations politiques suite à la réforme de la charte des partis.
Aujourd’hui, il n’y a que trois grands acteurs à savoir Les Démocrates encrés dans l’opposition et, du côté de la mouvance présidentielle l’UPR et le BR. Malgré cela, la présence de quelques petits partis risque d’empêcher ces derniers d’obtenir ce seuil, surtout qu’il s’agit de l’avoir dans chaque circonscription électorale.
Bien qu’il risque lui-même d’en être victime, le pouvoir justifie cette disposition par la volonté de réduire le nombre pléthorique de partis politiques et de mettre fin à l’émiettement partisan qui, selon certains, ralentit le bon fonctionnement des institutions. On évoque également le besoin de « moderniser » la vie politique en la rendant plus cohérente et structurée autour de quelques grandes forces politiques.
Cependant, de nombreux juristes et politologues remettent en question la constitutionnalité et l’équité d’un tel seuil. Ils rappellent que la démocratie repose sur la représentation des courants politiques, même minoritaires, et qu’un système aussi restrictif risque d’engendrer une défiance accrue vis-à-vis du processus électoral.
Face à cette situation, les partis de l’opposition appellent à une révision urgente du code électoral afin de ramener le seuil à un niveau plus raisonnable ou d’introduire des mécanismes d’équité pour les partis régionaux. D’autres plaident pour un dialogue national inclusif afin de rediscuter les règles du jeu politique.
Pierre MATCHOUDO