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Réforme du système partisan au Bénin : Les vieux démons de retour

 Réforme du système partisan au Bénin : Les vieux démons de retour

Initiée par le président Patrice Talon pour favoriser l’émergence de grands partis politiques, la réforme du système partisan semble mener progressivement à la case de départ.

Mis sur les rails en 2018, le nouveau système partisan béninois avait un objectif fondamental : réduire le nombre de partis politiques. En effet, en presque 30 ans de multipartisme intégral, le pays comptait plus de 200 formations politiques pour une population d’à peine 12 millions de personnes. La quasi-totalité de ces formations étaient exclusivement implantées dans les fiefs de leurs leaders. Le parti politique était devenu un moyen de chantage pour obtenir un poste au sein du gouvernement ou dans les structures publiques. L’une des conséquences de cet état de fait est qu’il était difficile d’avoir une majorité stable au Parlement, ce qui empêchait les gouvernements de mettre en œuvre leurs programmes.

Avec le nouveau système initié par le président Talon, le chemin conduisant vers la création d’un parti politique était devenu sinueux, parsemé d’embûches. Seuls ceux qui pouvaient prouver leur implantation nationale avaient le droit de mettre sur pied une formation. La mise en œuvre de cette réforme a conduit aux élections législatives d’avril 2019 ou seuls les deux blocs proches du chef de l’État étaient présents. En 2020 aux élections municipales et communales et en 2023 lors des élections législatives, le nombre s’est agrandi avec quatre partis politiques. Mais depuis, la donne a progressivement changé. Le paysage politique compte à ce jour plus d’une dizaine de partis, en l’occurrence le Bloc Républicain, l’Union progressiste, MOELE Bénin, les FCBE, l’UDBN, le PRD, les FCDB, RE, Les Démocrates… Si donc en seulement en si peu de temps, le paysage politique compte autant de partis, il est évident que, dans les années qui viennent il y en aura beaucoup plus. Ce qui  va annihiler les bénéfices escomptés par les initiateurs de l’actuelle loi.

Le ver est dans le fruit

En fait, le ver est dans le fruit et donc il ne saurait en être autrement. La nouvelle charte des partis n’a pas aboli le multipartisme. L’option de limiter naturellement le nombre en corsant les conditions de création ne fonctionne pas dans un pays comme le Bénin où les acteurs politiques sont constamment à la recherche des failles dans les lois. La nouvelle charte stipule que pour créer un parti, il faut désormais, non pas uniquement un membre fondateur, mais plutôt au moins 1155 membres fondateurs repartis sur l’ensemble du pays. On le comprend, c’est pour donner une assise nationale aux formations politiques. Mais dans un contexte où plus de la moitié de la population vit sous le seuil de  pauvreté, cette condition est vite remplie lorsque le projet de création de parti es porté par quelqu’un qui est nanti. Une fois cet obstacle franchi, le reste du parcours peut facilement être géré jusqu’à l’obtention de la reconnaissance officielle.

L’intérêt pour la création de partis politiques est devenu plus grand avec la nouvelle charte. En ce qui concerne le financement des partis politiques, le nouveau texte fixe de nouvelles conditions. Du coup créer un parti apparaît désormais comme un investissement qui sera tôt ou tard rentable. A moins que des mesures correctives soient prises pour éviter un retour à la case de départ. Et comme l’a déclaré l’ancien ministre Alain Adihou lors d’une émission sur la chaîne de télévision privée E-Télé Bénin. « La réforme politique, ce n’est pas seulement une affaire de textes mais il faut toucher également les hommes. La mise en œuvre de cette réforme politique n’a pas suffisamment touché les hommes. C’est parce qu’on n’a pas mis l’accent sur la qualité des hommes politiques que cela a entraîné différentes difficultés. Au niveau de la mouvance d’aujourd’hui, les gens essayent de gérer ses difficultés donc de camoufler leur derrière pour que tout ne sorte pas alors qu’au niveau des partis politiques dont les chefs se réclament de l’opposition qui ne sont pas ensemble ou quand ils se retrouvent ensemble, la qualité ne leur permet peut-être pas de dire mettons-nous ensemble. Nous n’avons pas besoin de nous diviser ».Pierre MATCHOUDO

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