Comme pour mettre fin à l’éternel débat qui consiste à savoir si un musulman devrait célébrer le 1er janvier, l’Arabie Saoudite a marqué le passage à 2023 de manière grandiose.
Pour ce passage à l’an 2023, plusieurs villes du Royaume ont organisé une grande variété d’événements au nombre desquels les feux d’artifice, les diners de gala et des spectacles de musique. A Ryad la capitale, l’emblématique édifice Faisaliah a crépité de mille feux d’artifice lorsqu’a sonné minuit, l’heure symbolisant le passage à la nouvelle année.
Que ce soit à Jeddah ou dans d’autres villes moins connues, des diners somptueux ont été proposés par des restaurants et des hôtels pour attirer les Saoudiens de plus en plus ouverts aux plaisirs mondains. En marge de ces activités, des concerts de musique ont été organisés avec la participation de grands noms de la musique arabe, comme Nancy Ajram, Elissa, Asala Nasri, Najwa Karam, Angham, Latifa, Nawal al-Zoghbi, Saber Rebai, Wael Kfoury, Assi el-Hallani, Bahaa Sultan et Walid Tawfeek.
Royaume ultra conservateur et plus haute autorité de l’Islam, tous les regards sont tournés vers l’Arabie Saoudite dont les politiques ont une grande influence sur la pratique de la religion. Longtemps resté en marge des célébrations du nouvel an du calendrier grégorien, le pays a, pour la première fois, rejoint le reste du monde le 1er janvier 2020, sans pour autant déclarer cette date fériée.
Auparavant, les Saoudiens n’avaient pas le droit de fêter la nouvelle année à cette date. Le haut comité des oulémas veillait à ce qu’aucune festivité n’ait lieu dans tout le royaume, le 1er janvier ne correspondant pas au calendrier hégirien suivi par l’Islam. Pour faire respecter cette fatwa – ou décret religieux, la police religieuse, chargée des bonnes mœurs, avait pour travail de surveiller les commerçants à qui il était interdit de vendre tout objet en rapport avec le Nouvel An.
Avec l’arrivée aux affaires du prince héritier Mohamed Ben Salmane dit MBS, la donne a radicalement changé. Grand réformateur, il est décidé à faire entrer son royaume dans l’ère de la modernité. Dirigeant de fait le royaume à la place de son père affaibli, MBS avait lancé en 2017 à des entrepreneurs à Ryad : “nous voulons vivre une vie normale ; tout ce que nous faisons, c’est revenir à ce que nous étions, un islam modéré, ouvert à toutes les religions et au monde.”
Avant que l’Arabie Saoudite ne se joigne au mouvement, la plupart des pays musulmans célébraient déjà le nouvel an grégorien. Ainsi, le Liban, le Yémen, l’Irak, la Syrie, l’Egypte et bien d’autres ont toujours organisé des manifestations marquant le 1er janvier. Mais la palme d’or de ces festivités revient aux Emirats Arabes Unis avec des méga feux d’artifices à Dubaï.
Quand bien même tous les pays du monde ne suivent pas le calendrier grégorien, ce dernier est devenu universel, les 12 mois qu’il comporte étant devenus une référence tant à l’international que pour marquer certaines dates locales. Refuser de célébrer le 1er janvier est un droit personnel mais il ne saurait se justifier par la religion, les gouvernements des pays arabes les plus conservateurs ayant fini par autoriser l’événement.
Abderrahman Touré