Majorité présidentielle au Parlement : Déjà des fissures

Le président  Patrice Talon peut-il vraiment compter sur « ses députés » ? En tout cas, déjà leur muraille a commencé à se lézarder, ce qui ne présage rien de bon en cette législature de fin de mandat.

Le ton de ce que sera la 9e législature a été donné dès le premier jour où les députés nouvellement élus ont mis le pied au Parlement. C’était dimanche 12 février à l’occasion de leur installation et de l’élection de leur président. Alors qu’ils ont une majorité confortable, une élue de l’opposition a eu le courage de se porter candidate au poste de premier responsable de l’Assemblée nationale. Sur 109 députés, qui aurait sans doute dit qu’elle  pouvait avoir plus que sur 28 députés.  Mais, contre toute attente, elle a obtenu 30 voix. C’est aussi le suffrage qu’ont obtenu d’autres candidats malheureux de l’opposition comme Michel François Sodjinou et Léon Dègni qui se sont présentés aux postes de 1er et 2e secrétaire.

Cela paraît anodin dans la mesure où les rapports de force sont loin d’être en faveur de l’opposition. Seulement, le fait que deux députés de la mouvance aient voté à plusieurs reprises en faveur des Démocrates montre le degré d’attachement de certains membres à la mouvance présidentielle dont ils appartiennent. En clair, il y a des « traîtres » tapis au sein de la majorité présidentielle. Deux « traîtres » précisément, auxquels il faut ajouter ceux qui ne sont pas d’accord avec le groupe mais qui n’ont pas encore osé rompre avec la discipline du groupe.

La cohésion des partisans du chef de l’État est d’autant plus fragile qu’ils sont répartis dans deux partis qui, au fil des années, sont devenus de véritables adversaires avec pour toile de fond souvent des questions personnelles. Pire, les querelles ont également lieu à l’intérieur même de chaque parti. Tous ces antagonismes ont entaché en toile de fond la constitution des commissions parlementaires.

Si le désamour entre députés de la mouvance ne risque pas de faire perdre au chef de l’État le soutien dont il a besoin, il est tout de même évident que les divisions vont aller crescendo à mesure que la fin du mandat présidentiel se rapprochera. Ceux qui nourrissent des ambitions personnelles risquent d’être tentés de faire cavaliers seuls quitte à saboter dans l’ombre les initiatives communes. En fait, il est de notoriété publique que certains députés ne sont pas dans les partis de la mouvance parce qu’ils aiment le président Talon, mais pour des raisons de convenance personnelle.

Craint par tous, Patrice Talon pourra sans doute maintenir une cohésion mais celle-ci risque d’être une marche forcée et alors, ceux qui suivent parce que n’ayant pas de choix risque de creuser sous la fondation de leur propre édifice.

Pierre MATCHOUDO