Lutte contre les sachets plastiques : Sandra Idossou tire la sonnette d’alarme

Reconnus comme une menace écologique et sanitaire majeure, les sachets plastiques ont été interdits au Bénin depuis 2017. Pourtant, sur le terrain, leur usage persiste. Sandra Idossou, activiste écologiste et promotrice de la campagne « Sachets Héloué », dans un entretien accordé au quotidien Fraternité, dresse un bilan mitigé de cette loi et appelle à une action plus ferme.
Adoptée en novembre 2017, la loi béninoise interdisant les sachets plastiques visait à protéger l’environnement et la santé publique. « C’est une bonne initiative », reconnaît Sandra Idossou. « Dans les supermarchés et les administrations, leur usage a diminué. Mais dans les marchés, ils sont encore omniprésents ».
Le problème ? L’application inégale de la loi. « La société civile ne peut pas agir seule. C’est à l’État de faire respecter les sanctions prévues contre les importateurs et vendeurs illégaux », souligne-t-elle. En l’absence de contrôles stricts, les sacs plastiques continuent d’envahir les rues et les décharges sauvages.
Sensibilisation et répression : un duo nécessaire
Pour inverser la tendance, l’activiste insiste sur deux leviers : Sensibilisation et répression. « J’estime qu’il est nécessaire de continuer la sensibilisation. La preuve, c’est que vous voulez en parler. Une habitude adoptée depuis 30 ou 40 ans ne disparaît pas en quelques mois ou même en quelques années. Il est donc fondamental d’insister, jusqu’à ce que les populations prennent conscience que le sachet plastique, bien que présent dans leur quotidien, n’est pas un allié » a-t-elle suggéré avant d’ajouter : « Il faut continuer la sensibilisation et amener les autorités à mettre en œuvre la loi, qui prévoit des amendes, voire des peines d’emprisonnement pour les promoteurs ou importateurs illégaux. Tant qu’aucun exemple n’est donné en mettant certains contrevenants aux arrêts, d’autres continueront à inonder le marché de sachets plastiques. Il faut saluer les efforts de la société civile pour sensibiliser les populations. Mais la population elle-même doit se sentir responsable. Quand on sort acheter de la bouillie chaude dans un sachet plastique, on ne peut pas toujours dire que c’est uniquement l’autorité qui ne fait pas son travail. Il faut continuer à tirer la sonnette d’alarme jusqu’à ce que chacun comprenne que les sachets plastiques sont un véritable danger pour la santé et l’environnement ».
« Sachets Héloué » : une initiative citoyenne qui peine à convaincre
À travers sa campagne « Sachets Héloué », Sandra Idossou organise des marches de ramassage de déchets et des événements de sensibilisation. « Avec toutes nos initiatives, à travers la campagne « Sachets Héloué », nous essayons de sensibiliser les populations. Quand nous courons, que nous marchons ou que nous ramassons des déchets plastiques, c’est pour que les gens réalisent à quel point le sachet plastique est un fléau. Une fois jeté dans la nature, il peut y rester plus de 400 ans », a-t-elle expliqué. Aujourd’hui, confie-t-elle « nous organisons également des événements nocturnes pour responsabiliser nos concitoyens sur la propreté de nos rues et leur propre rôle dans cette propreté. Ce sont des initiatives louables. Malheureusement, ce n’est pas toujours facile à organiser, à cause du manque d’adhésion des entreprises pour nous accompagner. C’est souvent avec beaucoup de difficultés que nous parvenons à mettre en place ces événements »
Cependant, dira-t-elle, le manque de soutien financier freine ces efforts. « Les entreprises hésitent à s’engager. Pourtant, sans mobilisation collective, rien ne changera ».
Zéro plastique : un objectif atteignable ?
Malgré les obstacles, Sandra Idossou reste optimiste. « S’il y a une volonté politique réelle et que l’on souhaite véritablement changer les choses, c’est possible. Si ce n’était pas le cas, je ne me serais pas engagée dans cette lutte. On a vu le gouvernement prendre des décisions fermes et se donner les moyens de les réaliser. Donc, je me dis que s’il décide de mettre fin à l’usage des sachets plastiques, c’est faisable. Cela nécessite bien sûr la mise en application de la loi, la disponibilité d’emballages biodégradables et l’implication active de la population. Si je me suis engagée dans ce combat depuis sept ans, c’est parce que je suis optimiste. Et si je continue d’en parler, c’est parce que je sais qu’il ne faut pas forcément beaucoup de choses : il suffit de volonté, et le pays peut y arriver. Nous avons déjà accompli beaucoup de choses. Et si nous décidons collectivement de lutter pour l’éradication du sachet plastique, c’est tout à fait possible. Mais pour cela, il faut arrêter les discours et poser des actes concrets », souhaite-t-elle. Elle plaide pour : « Des alternatives biodégradables accessibles ; Une répression accrue contre les trafics illégaux ; Une implication citoyenne renforcée ».
« Si la loi de 2017 a marqué un premier pas, son succès dépendra d’une application rigoureuse et d’une mobilisation collective. Le combat pour un Bénin sans plastique est loin d’être gagné, mais pas impossible » conclut Sandra Idossou.
La Rédaction