Levée d’interdiction d’exportation des produits vivriers : Entre logique et réalisme

La mesure d’interdiction d’exporter les produits vivriers du Bénin vers la sous-région est levée. Le gouvernement l’a fait savoir par l’entremise d’un arrêté ministériel datant du 23 juin 2025. Un retour à l’ordre normal justifié par le secrétaire général adjoint et Porte-parole du gouvernement par l’application stricte de sa politique d’industrialisation amorcée à la Glo Djigbé. Pour le sociologue et agro économiste, il le fallait pour éviter la saturation du marché local.
C’est désormais possible d’exporter le maïs, l’oignon, les haricots, les tubercules et autres produits vivriers vers les pays voisins. Cette mesure d’interdiction en vigueur depuis plus d’un an est donc levée. Elle était initialement prise pour garantir un approvisionnement suffisant des consommateurs sur le marché intérieur et à maintenir les produits de base à des coûts raisonnables, selon les autorités. Aussi, l’interdiction décidée visait-elle la promotion de l’industrie locale.
De La logique du gouvernement….
Le Secrétaire général adjoint et Porte-parole du gouvernement béninois, Wilfried Léandre Houngbédji, est revenu, vendredi 4 juillet 2025, sur les raisons de la levée de la mesure d’interdiction d’exportation des produits vivriers. Lors de sa rencontre hebdomadaire avec la presse, il a indiqué que la levée n’est pas un revirement de l’exécutif. « Quand on a annoncé l’interdiction, ce n’était pas une interdiction formelle ni intemporelle. Elle est encadrée dans un délai » corrige Wilfried Léandre Houngbedji pour informer que c’était une interdiction provisoire et bien raisonnée. L’objectif du gouvernement était de fournir en priorité les usines installées à Glo-Djigbé et garantir l’approvisionnement du marché national, a-t-il rappelé « Si on produit et qu’on exporte tout, c’est en vain qu’on aurait installé les usines » a argumenté le porte-parole.
Au réalisme …
Après plus d’un an d’application de la mesure d’interdiction, des constats se dégagent. Premièrement la grogne des producteurs et secondo, le risque de saturation du marché. Le socio-agroéconomiste, Djibril Azonsi fait donc remarquer que le gouvernement était face à des réalités du terrain. Et trois facteurs sont à relever selon lui. D’un côté la pression des producteurs et des commerçants locaux, ensuite le risque de découragement des producteurs et puis le respect des engagements internationaux notamment envers la sous-région de la CEDEAO estime Djibril Azonsi. En poursuivant il explique que « Cette interdiction a fortement paralysé une bonne partie des acteurs agricoles notamment ceux des régions transfrontalières » car beaucoup de produits vivriers tels que l’igname, l’oignon et autres trouvent leurs marchés dans les pays voisins comme le Nigéria, le Niger, le Togo donc « cette mesure a bloqué cette débouchée et créé la mévente pour ces acteurs » mentionne le socio-agroéconomiste.
…Risque d’insécurité alimentaire?
Si certains pensent que la réouverture du marché local béninois risque de créer l’insécurité alimentaire dans le rang des populations vulnérables, le socio-agroéconomiste, Djibril Azonsi, fait savoir que le risque n’est pas aussi élevé même si la sécurité alimentaire des béninois reste, toujours, fragile. Il analyse la situation sous deux angles. « En période de récolte, les prix ont chuté sur le marché parce que la production en année n-1 est restée sur le marché national (du fait de l’interdiction d’exporter), donc la production en année n est venue s’y ajouter ». Ce qui conduit poursuit-il à une « saturation sur le marché » avec comme conséquence, la chute des prix. « Ce qui risque de démotiver les producteurs à semer autant la saison suivante » explique Djibril Azonsi.
De l’analyse générale, le gouvernement a fait de l’équilibrisme en jouant sur les deux tableaux. Pour les producteurs et commerçants locaux, la levée est très saluée. Mais pour le socio-agroéconomiste, Djibril Azonsi, que rapporte Fraternité FM de Parakou, le gouvernement doit aller loin en définissant un mécanisme adéquat pour mieux encadrer la mesure pour réguler le marché intérieur sans compromettre la sécurité alimentaire des populations.
Arnaud ACAKPO (Coll)