Le parti Les Démocrates sur le Code Electoral : « Le Bénin mérite des élections libres »

À quelques mois des élections générales de 2026 au Bénin, le parti Les Démocrates (LD) monte au créneau pour dénoncer ce qu’il considère comme des «verrous antidémocratiques » dans le Code électoral. Lors d’une séance d’échange avec les médias ce 18 mai 2025, les responsables du parti ont exposé une liste de dispositions qu’ils jugent discriminatoires, susceptibles de fausser la transparence du scrutin.
« Nous ne nous laisserons pas faire cette fois-ci », a averti Eric Houndété, premier vice-président du parti, évoquant une mobilisation accrue pour « surveiller le suffrage du début à la fin ». Parmi les points soulevés par Guy Mitokpè, chargé de la communication du parti, plusieurs articles du Code électoral sont pointés du doigt pour leur caractère excluant ou favorable au pouvoir en place. Voici une analyse des principales critiques et des propositions de réforme avancées par l’opposition.
L’Article 17 : Un fichier électoral figé, des jeunes exclus du vote
Problème : L’article 17 impose à l’Agence nationale d’identification (ANIP) de transmettre la liste électorale définitive 180 jours avant le scrutin, sans possibilité de mise à jour. Conséquence : les jeunes atteignant 18 ans après cette date sont privés de vote.
Revendication : « Une seconde extraction du fichier avant la présidentielle est indispensable pour inclure ces nouveaux électeurs », plaide Dr Guy Dossou Mitokpè, secrétaire national à la communication.
L’Article 42 : Le quitus fiscal, un outil d’exclusion politique ?
Problème : Le certificat de quitus fiscal, obligatoire pour tout candidat, a déjà servi à écarter des opposants en 2022. Les retards ou refus de délivrance par l’administration fiscale créent un risque d’arbitraire.
Revendication : Remplacer le quitus par une déclaration sur l’honneur, comme le suggère LD, citant l’aveu du Directeur des Impôts en 2023 sur des « instructions » bloquant certains dossiers.
L’Article 66 : La CENA et l’opacité dans la composition des bureaux de vote
Problème : La désignation des présidents et assesseurs des bureaux de vote par la CENA manque de transparence. LD craint une surreprésentation des partisans du pouvoir.
Revendication : « Les partis politiques, y compris l’opposition, doivent proposer des membres pour garantir l’équité », propose Mitokpè.
L’Article 93 : L’accès aux PV, un monopole dangereux
Problème : Un seul exemplaire des procès-verbaux est remis aux partis, favorisant leur confiscation par la majorité. Sans preuves, les recours contre des fraudes deviennent impossibles.
Revendication : « Chaque représentant de parti doit recevoir une copie certifiée. Tout refus doit être sanctionné comme fraude », insiste LD.
L’Article 132 : Le parrainage à 15 %, un seuil « le plus élevé au monde »
Problème : Actuellement, le parti d’opposition « Les Démocrates » (LD) dispose exactement de 28 députés, soit le nombre exact requis pour parrainer un candidat. À première vue, cela pourrait permettre au parti de présenter un candidat en 2026, mais il suffirait qu’un seul député des Démocrates soit empêché, contraint à la démission ou empêché de voter, pour faire chuter leur nombre sous le seuil des 28 députés. Dans le passé, des pressions politiques, des exclusions ou des défections orchestrées ont déjà été utilisées pour affaiblir l’opposition au Bénin et dans certains pays africains.
Comparaison : Le code électoral dispose qu’il faut 15% des parrains, c’est le taux le plus élevé au monde pour les pays où il existe le système de parrainage. En France par exemple il est de 1,17% soit 500 parrains sur 42 600 parrains. Au Sénégal, il est de 0,6 à 0,8% des électeurs, ou de 13 Députés sur 165 soit 7,87%. Le système de parrainage pour qu’il ne soit pas exclusif doit tenir compte des partis politiques en place. Nous avons au Bénin au moins 17 partis politiques. S’il faut 15% pour un parti, c’est qu’il ne peut avoir au mieux que 6 Duos (Président et Vice-président) à l’élection présidentielle. Les 11 partis restants sont exclus.
Revendication : « Abaisser le seuil à 5 % et autoriser le parrainage libre, sans restriction partisane », propose le parti.
L’Article 146 : Le piège des 20 % pour les législatives
Problème : Un parti doit obtenir 20 % des voix *dans chaque circonscription pour avoir des sièges. Même victorieux dans 23/24 circonscriptions, un échec dans une seule annule tout.
Le piège des coalitions : Seuls les partis atteignant 10 % nationalement peuvent former des alliances. LD dénonce une manœuvre pour favoriser l’UP-R et le BR.
Revendication : « Ramener le seuil à 5 % au niveau national pour une représentation plus juste. »
« Nous allons contourner le piège », promettent Les Démocrates. Eric Houndété assure que son parti « surveillera chaque étape » en 2026. Mais sans révisions législatives, la crédibilité des élections pourrait être entachée. Les Démocrates appellent à une mobilisation citoyenne et médiatique pour alerter sur ces « risques majeurs pour la démocratie ». « Le Bénin mérite des élections libres, pas des lois taillées sur mesure », conclut Mitokpè.
Etienne YEMADJE