Le Bénin résiste, le Niger s’enlise : L’échec de Tiani

Alors que les Nigériens n’y gagnent rien, le général Tiani intensifie son bras de fer solitaire. Après avoir repris sa rhétorique sur un prétendu soutien aux terroristes, le Bénin y a apporté un démenti ferme. Mais au-delà, le gouvernement devrait suivre les autorités nigériennes dans leur logique de fermeture de la frontière, en les contraignant à en assumer toutes les conséquences.
Nouvelles tensions entre le Bénin et le Niger. Le 31 mai dernier, le général Abdourahamane Tiani, chef de la junte militaire au pouvoir à Niamey, a une nouvelle fois surpris par ses déclarations. Dans une intervention relayée par les médias d’État, il a accusé le Bénin de « soutenir le terrorisme » dans la sous-région. Ce serait, selon lui, la raison principale du maintien de la fermeture de la frontière terrestre entre les deux pays, décidée après le coup d’État militaire du 23 juillet 2023. Ces nouvelles accusations, qualifiées d’élucubrations par certains, n’ont pas laissé indifférentes les autorités béninoises, qui les ont catégoriquement rejetées.
Depuis le putsch, les relations entre les deux pays se sont sérieusement dégradées. Incapables d’améliorer les conditions de vie des Nigériens comme ils l’avaient promis, les militaires au pouvoir n’ont cessé de faire du Bénin leur bouc émissaire, pour détourner l’attention de leur échec tant sécuritaire que social. C’est dans cette optique que la frontière est restée fermée depuis juillet 2023, malgré la bonne volonté dont a fait preuve la partie béninoise.
Depuis, les échanges portuaires sont officiellement à l’arrêt, le Niger ayant choisi de faire passer l’essentiel de ses importations par le port de Lomé au Togo, en lieu et place de celui de Cotonou. Mais ce faisant, le général Tiani s’est retrouvé dans la situation du serpent qui se mord la queue.
En effet, si le Bénin déplore le manque à gagner au Port autonome de Cotonou, ce sont les Nigériens qui subissent le plus lourd tribut de cette situation. Les importations alimentaires, essentiellement composées de riz et de maïs venus du Bénin, se sont effondrées. Résultat : les prix des denrées de base ont explosé, rendant l’alimentation difficile pour de nombreuses familles. Le transport d’un conteneur depuis le port de Lomé, alternative coûteuse, revient à plus du double de ce qu’il coûtait via Cotonou. Pire, les délais de livraison, auparavant inférieurs à une semaine, s’étendent désormais jusqu’à deux mois, avec tous les risques sécuritaires que cela implique.
Face à cette réalité, les militaires nigériens maintiennent un discours martial, mais dans les faits, ils assistent avec complicité à une tricherie au niveau de la frontière. C’est ainsi que des bus de transport stationnent désormais de part et d’autre du fleuve frontalier. Les passagers traversent en pirogue, puis poursuivent leur route. De même, des camions provenant de Cotonou arrivent au Niger en passant par des routes qui les mènent d’abord au Nigéria.
De son côté, tout en dénonçant un discours belliqueux, le Bénin semble déjà résilient. Grâce à cette crise de confiance, des initiatives ont été multipliées pour améliorer les recettes de l’État, ce qui rend quasiment superflues les pertes dues à la fermeture de la frontière.
Cela étant, les autorités béninoises devraient contraindre les militaires de Niamey à assumer jusqu’au bout les conséquences de leur politique. Il s’agirait donc d’empêcher toute traversée du fleuve en des points autres que la frontière officielle. Il y va du respect du pays, mais surtout de la sécurité. Pour rappel, les attaques terroristes subies par le Bénin sont toutes venues des pays frontaliers du nord, que sont le Niger et le Burkina Faso.
Pierre MATCHOUDO