Impact de la Fermeture de la Frontière entre le Bénin et le Niger : Entre Sécurité et Enjeux Économiques

Depuis la fermeture de la frontière entre le Bénin et le Niger, les voies qui relient les deux pays connaissent une baisse significative du trafic. En particulier, la route inter-Etat empruntée par les convois de voitures, les camions de marchandises et les bus reliant les deux pays était tristement célèbre pour ses nombreux accidents de la circulation. 

Cet axe, le plus long du Bénin, traverse des régions où une grande partie de la population vit du commerce et du transport. La réduction du flux de véhicules a permis de fluidifier la circulation et de limiter les risques d’accidents. « Avant, il y avait une sorte de chaos sur le tronçon à cause du nombre de véhicules en circulation, de la vitesse excessive, du manque du respect du code de la route et des camions en panne qui bloquaient parfois la route pendant des heures. Aujourd’hui, la circulation est plus fluide, et on compte moins de drames », témoigne un chauffeur de bus. 

Un impact économique en cascade 

Le Bénin joue un rôle clé dans l’approvisionnement du Niger en marchandises via le Port de Cotonou. La fermeture de la frontière a, par conséquent, entraîné un ralentissement des importations destinées au marché nigérien, impactant directement les recettes portuaires. Toutefois, selon les autorités portuaires, cet impact reste limité.  Le Port de Cotonou bénéficie en effet d’un autre marché de taille : le Nigéria. Avec plus de 200 millions d’habitants contre environ 27 millions pour le Niger, le Nigéria représente une opportunité économique bien plus vaste. De nombreux hommes d’affaires nigérians préfèrent utiliser le port béninois pour des raisons de sécurité et de rapidité, atténuant ainsi les pertes liées à la fermeture de la frontière avec le Niger. 

Au-delà des aspects économiques, la fermeture de la frontière affecte aussi les relations sociales et culturelles entre les deux peuples. Béninois et Nigériens partagent une histoire, des traditions et des liens familiaux très forts, en particulier dans les zones frontalières. 

Des relations sociales et culturelles fragilisées 

Au-delà des aspects économiques, la fermeture de la frontière affecte profondément les relations sociales et culturelles entre les deux peuples. Béninois et Nigériens partagent une histoire, des traditions et des liens familiaux très forts, en particulier dans les zones frontalières. 

« Nous avons de la famille au Niger, et c’est devenu compliqué de leur rendre visite », déplore un habitant de Malanville, une ville frontalière béninoise. De nombreux commerçants et transporteurs, qui vivaient de l’échange entre les deux pays, se retrouvent en difficulté, alimentant un sentiment de frustration et d’injustice. 

Vers une résolution ? 

La fermeture de la frontière s’inscrit dans un contexte de tensions politiques et diplomatiques. Depuis le coup d’État militaire au Niger en 2023, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait imposé des sanctions économiques, auxquelles le Bénin a pris part en fermant sa frontière. Bien que ces sanctions soient levées par la CEDEAO, les sanctions aient été levées quelques mois plus tard, les autorités militaires nigériennes ont maintenu la frontière fermée et cela en dépit du plaidoyer des appels de pied du Bénin.

Si la réouverture de la frontière reste suspendue au bon vouloir de la junte militaire à Niamey, les impacts économiques et sociaux se font déjà sentir. Les commerçants, transporteurs et populations des deux pays espèrent un retour à la normale, tandis que les autorités béninoises cherchent à minimiser les effets négatifs en renforçant les échanges avec d’autres partenaires. 

La fermeture de la frontière entre le Bénin et le Niger a entraîné une augmentation du coût de la vie au Niger, notamment en raison du changement d’itinéraire des marchandises. Alors que la route Cotonou-Niamey offrait un accès direct et rapide, les importations passent désormais par le Port de Lomé avant de transiter par le Burkina Faso.

Ce détour est plus long et plus onéreux, avec des frais de transport en hausse, ce qui se répercute sur les prix des denrées alimentaires, du carburant et des biens de consommation. De plus, cette route est particulièrement dangereuse en raison de l’activité des groupes djihadistes au Burkina Faso, augmentant les risques pour les transporteurs et entraînant des coûts supplémentaires liés à la sécurité. Les ménages nigériens, déjà confrontés à l’inflation, subissent de plein fouet cette situation, tandis que les commerçants cherchent des solutions pour limiter l’impact sur les prix.

En attendant, la route qui reliait autrefois le Bénin au Niger reste un symbole des défis auxquels font face les deux pays : entre amélioration de la sécurité routière et fractures économiques et sociales, la fermeture de la frontière continue de diviser et de questionner l’avenir des relations entre ces deux nations voisines.  Alors que les routes se vident et que les accidents diminuent, les défis économiques et sociaux rappellent que la véritable solution réside dans le dialogue et la coopération régionale.

Pierre MATCHOUDO