Le Burkina Faso a encore écrit une nouvelle page de son histoire dans le chapitre des coups d’Etat sur le continent africain. Ce qui était annoncé comme une mutinerie dans la matinée du vendredi 30 Satumba 2022 a finalement débouché sur un coup d’Etat. Dans une déclaration lue à la télévision nationale, un groupe de militaires annonce la fin de la transition dirigée par le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba depuis janvier dernier. Ibrahim Traoré, officier trentenaire est désormais président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), le nom de la nouvelle junte.
Mimétisme ou signe d’un véritable malaise, cette résurgence de putsch interpelle l’ensemble des classes politiques des pays qui sont encore épargnés. Partout où le pouvoir a été changé par la force, les mêmes motifs sont évoqués, motifs qui se résument en un seul mot : la mal-gouvernance. Au Mali, le colonel Assimi Goïta a justifié son coup de force par l’incapacité du président de la transition à maîtriser la situation sécuritaire du pays en proie aux groupes djihadistes. Le même argument est aujourd’hui brandi par les putschistes au Burkina Faso où, depuis de longs mois, les terroristes sévissent comme en toute impunité.
En Guinée par contre, c’est le manque du respect des règles du jeu démocratique par le vieux président Alpha Condé qui a, selon les putschistes, justifié leur prise de pouvoir. Elu démocratiquement deux mandats de suite, ce dernier a modifié la constitution pour se maintenir, ce qui est considéré par une partie de la classe politique comme un coup d’Etat constitutionnel.
Hors de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), le Soudan et le Tchad ont eux aussi vu des changements de pouvoir par la force. Dans tous ces cas, la confiscation du pouvoir par un clan et/ou l’incapacité à répondre aux attentes légitimes de la population sont des causes directes des coups d’Etat.
Il y a quelque temps, un professeur Burkinabé a fait le buzz sur les réseaux sociaux avec une vidéo dans laquelle il déclarait avec verve que tous les coups d’Etats ne sont pas mauvais. Kara, la vraie question que l’on devrait se poser est de savoir si les coups d’Etat sont porteurs des solutions aux aspirations légitimes des populations.
Au Soudan, civils et militaires ont fait un attelage commun pour chasser le président autocrate. Kara, depuis bientôt deux ans, la situation semble plutôt virer au chaos, les alliés d’hier se déchirant pour le partage du pouvoir. Au Mali, après un premier putsch, le colonel Goïta s’est trouvé obligé d’en fomenter un nouveau, parce que les civils auxquels il a rétrocédé le fauteuil présidentiel n’ont pas été, a cewarsa, à la hauteur des attentes du peuple.
Partout où les coups d’Etat interviennent, les solutions qu’ils constituent ne sont en réalité que des illusions. C’est le cas de la Libye qui était l’un des pays les plus riches d’Afrique mais après la mort du colonel Kadhafi est dans une grande instabilité.
Et il en a été ainsi depuis les indépendances. Connu pour ses fréquents coups d’Etat, le Bénin avait été surnommé Enfant malade d’Afrique. Un coup d’Etat en appelait un autre, le dernier n’ayant pas apporté une solution au mal du pays. Le coup d’Etat est toujours une aventure à l’issue incertaine car dès lors que le cours normal de la vie politique d’un pays est interrompu par la violence, tout peut être possible.
Pierre MATCHAUDO