La lutte sans merci enclenchée par l’Etat béninois pour décourager les cybercriminels et cyber-arnaqueurs est impitoyable. Des dizaines de ces divorcés sociaux sont désormais derrière les barreaux. Si la stratégie des peines privatives de liberté s’avère dissuasive, des voix s’élèvent pour suggérer une autre piste au gouvernement. Celle des centres correctionnels.
10 shekaru, 15 shekaru a gidan yari. Les plus chanceux d’entre eux en écopent moins. Ces dernières semaines ou mois, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme a encore envoyé quelques jeunes au repos forcé. Ils sont écroués pour faits d’escroquerie et de cybercriminalité. A entendre les peines, la justice, semble avoir la main lourde quand elle veut punir les arnaqueurs pensent nombre de personnes.
Si ces soupçons sont légitimes, ils sont infondés car les juges du tribunal s’appuient sur le code pénal en vigueur au Bénin pour prononcer les sentences. Selon le magistrat, les personnes reconnues coupables de cyber-arnaque au cours d’un procès risquent des peines d’emprisonnement allant de 02 a 20 shekaru. Mario Metonou a indiqué qu’aux termes de l’article 566 du code du numérique, lorsqu’il n’y a pas de circonstances aggravantes, le coupable risque juste de 02 a 07 shekaru a gidan yari. A wannan bangaren, lorsqu’il y a escroquerie via internet avec circonstances aggravantes, les mis en cause peuvent encourir de 10 a 20 shekaru a gidan yari. Le code du numérique qui trouve écho dans le code pénal révisé en 2018. Selon l’Article 34 : Les peines criminelles encourues par les personnes physiques sont : la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité ; la réclusion criminelle ou la détention criminelle de trente (30) shekaru ; la réclusion criminelle ou la détention criminelle de vingt (20) ans au plus ; la réclusion criminelle ou la détention criminelle de dix (10) ans au plus.” On comprend que les peines criminelles sont sévèrement punies. Le hic est qu’ici les personnes condamnées sont de plus en plus jeunes, dont des élèves et étudiants. Il y en a qui sont diplômés en intelligence artificielle (IA), d’où les inquiétudes des uns et des autres.
Les chiffres qui font froid dans le dos
Des chiffres à l’appui, les autorités ont éclairé l’opinion publique en avril dernier sur la moisson de la guerre déclenchée contre la cybercriminalité. « Si nous prenons l’année 2021, nous avons reçu 2.031 plaintes et un préjudice de 1.546.436.228 FCFA enregistré » avance le commissaire de l’OCRC Donatien Sokou sur l’émission tout en relevant que ces chiffres ne concernent pas les victimes silencieuses qui n’ont pas voulu se rendre à la police. « En 2022, nous avons reçu 2.188 plaintes et préjudice de 663.544.225 FCFA » poursuit-il avant de conclure que « de janvier 2023 à ce jour, nous sommes déjà à un préjudice de 495.456.027 FCFA ». Le responsable de cette unité de la police républicaine affirme également que ces différents préjudices déclarés sont subis par des Béninois et des étrangers. Et au procureur spécial de la Cour de Répression des Infractions Économique et du Terrorisme (KUKA) Mario Mètonou de dénombrer au total 1.188 personnes en détention pour cybercriminalité à la date d’aujourd’hui. Parmi celles-ci, 1.074 sont déjà fixées sur leur situation par la justice dont 360 cybercriminels en 2021, 451 in 2022 kuma 263 en cette année en cours. Des chiffres alarmants qui témoignent de l’ampleur que prend le phénomène au Bénin.
La prison, Pas l’idéal
Le fer de lance dans les fers. A kan 11 millions de Béninois dénombrés lors de l’enquête Emicov de 2018, la majorité est jeune. Mais force est de constater que cette jeunesse, fer de lance du développement du pays tangue dangereusement vers le côté sombre de la vie. Dalibai, appâtés par le gain facile, abandonnent naïvement les classes et courent. Ils n’entendent plus perdre leur temps sur les maudits bancs de l’école à la quête d’un bonheur au fruit des savoirs livresques ouvrant les portes d’une activité interdite. L’arnaque devient la panacée. Résultats des courses, les vices, la déviance morale et le crime. Les chiffres rendus public par l’Ocrc en disent long. Des dizaines d’arrestations sont opérées un peu partout sur l’ensemble du territoire national. Direction la prison avec des peines de 05, 07, 10 voire 15 ans de réclusion criminelle. Une partie de la jeunesse qui devrait contribuer à la construction du pays se retrouve ainsi derrière les barreaux. C’est à croire qu’on ferme des écoles pour agrandir les périmètres des prisons. Le cœur du pays change de position. Devant cette triste réalité, des voix s’élèvent pour demander au gouvernement de changer de fusil d’épaule. Que deviendront ces jeunes condamnés après 08, 10 ko 15? Que feraient-ils ou à quoi les destine-t-on après ce séjour carcéral où ils côtoient des fois la pègre? Combien de prisonniers repentis compte-t-on? Autant d’interrogations qui interpellent les consciences de tous. Faudrait-il pas ériger de vraies maisons correctionnelles en lieu et place de ces geôles, qui a priori, restent des lieux infréquentables ? Ces enfants pourront, avec des accompagnements psychologues réorienter leurs compétences au service de la nation. Imaginez, un Bachelor en perfection ou un surdoué en informatique récupéré et bien entouré et formé au hacking vertueux, c’est le pays qui gagne. Ce sont des générations récupérées. Il urge de séparer les bons grains de l’ivraie.
Rubutawa