Alors que sous d’autres cieux des partis d’opposition tentent de constituer une union sacrée contre le pouvoir, a Benin, la scène politique est animée de piques entre opposants à quelques mois d’une élection cruciale.
Théophile Yarou, l’ancien ministre de la Défense de Yayi Boni qui vient d’obtenir la reconnaissance officielle pour son tout-nouveau parti ne veut pas traiter avec des opposants « qui refusent d’évoluer » ni avec ceux d’entre ces derniers qui sont « des plaisantins ». Selon certaines indiscrétions, un autre pilier de l’opposition, entretemps partisan du président Talon, plaiderait pour le boycott des élections législatives de janvier prochain. A wannan lokacin, Moïse Kérékou tacle Les Démocrates (LD), un parti dont il fut membre éphémère, démission qu’il expliquait, en décembre 2021, par le fait que les LD lui reprochent de s’être présenté à l’élection présidentielle sous la bannière d’un autre regroupement.
Pour les uns et les autres, les FCBE parti d’opposition originelle, n’est plus qu’un regroupement à la solde du pouvoir. Créé par le président Yayi Boni alors qu’il était au pouvoir, ce parti a connu des heures de gloire avant de sombrer suite à la démission de son fondateur, suivi du départ massif de ses militants. Cette scission fut suivie de la création de Les Démocrates, parti visant à renverser la situation de monopole dont jouissent l’Union progressiste et le Bloc Républicain, tous deux sous la coupe du président Talon. Mais depuis la dernière élection présidentielle marquée par l’arrestation des candidats Reckya Madougou et Joël Aïvo, ce parti semble avoir perdu de son ardeur au combat.
Avec tous ces crocs-en-jambe, c’est un euphémisme que de dire que l’opposition évolue dans une véritable cacophonie. Cela d’autant plus que la position de certains dinosaures comme l’ancien président Nicéphore Soglo, est difficilement lisible. Après avoir livré une véritable guerre au chef de l’Etat, ce dernier a d’autant plus adouci ses propos et il a même été filmé soufflant des paroles dans les oreilles de son « ennemi », celui-là même qui a contraint son fils, le maire Léhady à l’exile. Bien avant, il avait publiquement désavoué son allié l’ancien président Yayi Boni.
Les opposants s’opposent entre eux alors qu’il y a bien des raisons d’affirmer leur opposition à la politique du président de la République et à exiger que le gouvernement règle les problèmes en cours, problèmes liés en grande partie à l’inflation. En lieu et place, ce sont les syndicats, entretemps dormant, qui se sont réveillés pour donner de la voix.
Le manque de stratégie et d’harmonie au sein de l’opposition arrange les partis alliés au président Talon. Lallai, au moment même où les opposants se dénigrent, pour leur part, ils sont en train d’affuter leurs armes afin de conquérir les sièges du Parlement et cela, de manière transparente. Il ne sera donc pas surprenant d’avoir encore une Assemblée nationale entièrement acquise au président de la République. Une situation qui sera mise à profit pour faire des lois visant à favoriser le maintien du système à l’issue de la prochaine élection présidentielle. En définitive, l’opposition ne fait que jouer à se saborder au moment même où il lui faut regrouper ses forces pour aller à la conquête du pouvoir.
Pierre MATCHAUDO