Elvyre Dossou : La céramiste qui sublime l’Afrique

POLYCOPIÉ – Elvyre Dossou Ossou, fondatrice de la marque spécialisée dans les arts de la table baptisée « Kemi Home Art » Photo: Elvyre Dossou Ossou/Photo privée autorisée/dpa
Inspirée par les richesses culturelles africaines, Elvyre Dossou transforme la porcelaine en œuvres d’exception. À travers sa marque Kemiha, elle sublime chaque repas en une célébration du patrimoine africain. Portrait d’une créatrice audacieuse qui allie tradition et modernité.
C’est dans cette commune de la métropole du Grand Paris que Elvyre Dossou a décidé de mettre le couvert. Lorsque l’on franchit le seuil de son atelier showroom, le visiteur est d’abord accueilli dans un petit couloir extérieur où quelques ébauches d’assiettes et de tasses en porcelaine, ornées de motifs inspirés des patrimoines culturels africains, sont disposées sur une longue table. A l’intérieur, le regard se perd, captivé par la vaisselle qui se compte par dizaines. Dans un recoin, la maîtresse des lieux trône derrière son bureau.
Depuis 2022, Elvyre Dossou dirige Kemiha, son entreprise spécialisée dans la fabrication et la commercialisation d’arts de table en porcelaine, sublimés par les mille et une cultures du Continent. Masques sacrés de la tribu goun, tissus kente du Ghana aux couleurs lumineuses, silhouettes majestueuses des Amazones du Bénin, étoffes ndop des Bamiléké du Cameroun… L’Afrique constitue pour elle un territoire créatif inépuisable et une source perpétuelle d’inspirations. Pour que les motifs imprimés sur biscuit restituent fidèlement la réalité, la jeune entrepreneuse les redessine méticuleusement sur tablette. Elle les transpose ensuite sur une surface vierge grâce à la sérigraphie numérique. Le résultat fascine: les détails des motifs sont restitués avec une précision saisissante, capturant l’âme même des tissus ou des masques ancestraux.
Ses premiers pas
C’est à Cotonou qu’Elvyre Dossou effectue ses premiers pas. Sa famille s’installe par la suite à Bohicon, paisible cité provinciale, à environ 9 km d’Abomey, capitale historique où elle grandit. À 18 ans, le baccalauréat en poche, elle regagne Cotonou pour poursuivre ses études. La journée, l’étudiante endosse le rôle de commerciale au sein du groupe CFAO Motor, société multinationale notamment spécialisée dans les secteurs de la distribution automobile. Au coucher du soleil, elle rejoint l’université où elle suit des cours du soir en marketing et communication.
Au détour d’une journée ordinaire, elle croise la route du dirigeant d’Air Ivoire, en escale au Bénin, contraint de faire appel aux services de CFAO, suite à une panne automobile. « Il a apprécié ma façon de lui présenter un véhicule, il m’a recrutée séance tenante. » Parée pour l’aventure, Elvyre Dossou quitte alors sa terre natale pour Abidjan où elle officie comme commerciale externe au sein de la compagnie aérienne. Puis en 2014, elle s’établit en France, où elle parachève son cursus à l’ESG Management School, en décrochant un MBA en marketing et publicité.
Elle amorce ensuite une carrière hexagonale à la Maaf, un des premiers assureurs généralistes en France, où elle officie comme gestionnaire de patrimoine. À cette période, elle fait la connaissance de celui qui deviendra son mari. La rencontre avec cet ingénieur spécialisé en science des procédés de fabrication innovants enrichira sa vision et son approche du design et des matériaux.
L’ascension
C’est en préparant le baptême de son fils qu’elle conçoit l’idée de créer sa marque d’arts de table. «J’ai souhaité offrir, à cet instant, une parcelle de ma culture à mes proches et mes amis installés en France. Sur la Toile, elle explore vainement les plates-formes commerciales habituelles ou spécialisées en quête de vaisselle rehaussée de motifs et symboles reflétant les cultures africaines, mais en vain. Elle décide alors de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Lorsqu’une passion nous anime, il faut oser franchir le pas», assure la talentueuse porcelainière.
Elle entreprend alors, durant six mois, une formation outre-Rhin pour maîtriser les subtilités du métier. Avec Kemiha, recevoir prend l’allure d’un rituel où chaque convive voyage au gré des cultures, transformant l’ordinaire en extraordinaire. Ou le simple café bu dans une de ses tasses devient un breuvage exquis.
Chloé KALUSEVI (Brune N°107)