Comme un éléphant dans un magasin de poterie : Trump compromet plusieurs projets au Bénin

 Comme un éléphant dans un magasin de poterie : Trump compromet plusieurs projets au Bénin

A peine revenu à la Maison-Blanche le 20 janvier 2025, Donald Trump a signé une série de décrets aux implications lourdes pour l’Afrique. Parmi ces mesures, le retrait des États-Unis de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la suspension de l’aide au développement et une politique protectionniste renforcée menacent les équilibres économiques et sanitaires du continent. 

Le retrait des États-Unis de l’OMS est un coup dur pour les pays africains, qui dépendent largement de l’appui de l’organisation pour renforcer leurs systèmes de santé. L’OMS joue un rôle crucial dans la lutte contre les épidémies, les campagnes de vaccination et les initiatives de santé publique. 

Pour le Bénin, ce retrait risque de compliquer la lutte contre des maladies comme le paludisme, la tuberculose et le VIH/SIDA, qui bénéficiaient des financements américains via l’OMS. En 2024, par exemple, 25 % des fonds de la lutte contre le paludisme au Bénin provenaient de contributions indirectes des États-Unis. La cessation de ces financements pourrait ralentir les efforts sanitaires et mettre des millions de vies en danger, notamment dans les zones rurales. 

En Afrique de l’Ouest, où les campagnes de vaccination et les systèmes de surveillance des épidémies dépendent souvent de l’OMS, les conséquences pourraient être catastrophiques, notamment si une nouvelle crise sanitaire survenait. 

 En plus du retrait de l’OMS, le sulfureux président américain a également ordonné la suspension pendant 90 jours de toutes les nouvelles obligations et des versements d’aide au développement aux pays étrangers, aux ONG, et aux organisations internationales. Cette décision touche directement le Bénin, qui reçoit une aide substantielle des États-Unis pour financer ses infrastructures, l’éducation et l’agriculture. 

Le Millennium Challenge Corporation (MCC), un programme phare américain, a récemment débloqué des centaines de millions de dollars pour moderniser le réseau électrique du Bénin. Une suspension prolongée de l’aide pourrait retarder, voire annuler ces projets, avec des répercussions sur la croissance économique, le développement social et la mise au chômage de centaines de travailleurs. 

À l’échelle continentale, la suspension de l’aide risque d’aggraver les déséquilibres économiques. L’Afrique subsaharienne est l’une des principales bénéficiaires de l’aide américaine, avec des fonds alloués à l’éducation, à l’accès à l’eau potable et à la sécurité alimentaire. La suspension de ces financements pourrait creuser davantage les écarts entre les économies africaines et celles des pays développés. 

Dans une logique protectionniste, Donald Trump a également annoncé l’instauration de nouveaux droits de douane tous azimuts, menaçant directement l’African Growth and Opportunity Act (AGOA). Ce programme commercial, qui offre un accès privilégié au marché américain pour certains produits africains, est une bouée de sauvetage pour plusieurs pays, dont le Bénin. 

Le secteur textile béninois, par exemple, profite de l’AGOA pour exporter ses produits vers les États-Unis. Une suspension de ce programme pourrait entraîner une chute brutale des exportations, affectant des milliers d’emplois locaux. 

Au-delà du Bénin, des pays comme l’Éthiopie, le Ghana et le Kenya, qui bénéficient également de l’AGOA pour leurs industries manufacturières, risquent de subir des pertes économiques significatives. 

Ces décisions traduisent une indifférence assumée de Donald Trump vis-à-vis de l’Afrique. Contrairement à ses prédécesseurs, qui avaient souvent mis en avant des initiatives pour renforcer les partenariats avec le continent, Trump semble privilégier un repli stratégique. L’absence d’engagement clair envers l’Afrique envoie un signal négatif aux dirigeants africains et pourrait encourager d’autres grandes puissances, comme la Chine et la Russie, à renforcer leur influence. 

Face à ces mesures, les pays africains devront redoubler d’efforts pour diversifier leurs partenariats économiques et financiers. La montée en puissance des acteurs comme la Chine pourrait compenser une partie des pertes tout en suscitant un regain d’intérêt des Etats-Unis qui ont engagé un bras-de-fer permanent avec ce pays.

Pierre MATCHOUDO

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