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AES et Franc CFA : Une souveraineté à géométrie variable

 AES et Franc CFA : Une souveraineté à géométrie variable

Virulents lorsqu’il s’agit de critiquer la France et sa prétendue influence sur la Cedeao, les membres de l’Alliance des Etats du Sahel ne semblent pourtant pas prêts à abandonner le franc Cfa qualifié par leurs idéologues de monnaie coloniale.

L’Alliance des États du Sahel (AES), regroupant le Burkina Faso, le Mali et le Niger, achève cette semaine son processus de sortie définitive de la CEDEAO annoncé un an plus tôt, en janvier 2024. Cette rupture marque la volonté affichée de souveraineté, à la fois politique et économique.
Pourtant, malgré les critiques virulentes contre la Cedeao qualifiée d’être influencée par la France, et le franc CFA, qualifié pour sa part de « monnaie coloniale », ces pays ne semblent pas pressés de créer leur propre devise. Cette contradiction soulève des questions sur la véritable portée de leur discours souverainiste.
L’un des principaux arguments avancés par l’AES pour justifier son opposition au franc CFA réside dans sa dépendance à l’égard de l’euro et du Trésor français, qui garantissent sa stabilité. Le choix de conserver cette monnaie malgré cela révèle une réalité économique incontournable : pour des pays dont les économies restent fragiles comme c’est le cas pour les trois membres de l’AES, créer une monnaie nationale ou régionale est une aventure périlleuse.
Le cas du Mali est particulièrement instructif. Entre 1962 et 1984, le pays avait opté pour sa propre monnaie, le Franc malien. Cette tentative d’émancipation économique s’est cependant soldée par un échec cuisant : inflation galopante, dévaluation répétée et perte de confiance des citoyens. Finalement, le Mali a réintégré la zone franc et la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), confirmant l’importance d’une monnaie stable et crédible.
Outre les leçons de l’échec du Mali, le maintien du franc CFA par les membres de l’AES trahit une certaine peur de souveraineté totale face aux implications d’une souveraineté monétaire. La création d’une monnaie nécessite des ressources considérables : mise en place d’une banque centrale indépendante, impression de nouveaux billets, gestion des réserves de change, et surtout, instauration d’un climat de confiance auprès des citoyens et des investisseurs.
Or, ces pays font face à des défis gigantesques, notamment sécuritaires. Leurs gouvernements peinent déjà à financer leurs armées et à assurer les services de base à leurs populations. Dans ce contexte, se lancer dans une réforme monétaire apparaît comme un pari risqué qu’ils préfèrent éviter, malgré leurs déclarations enflammées contre le franc CFA.
Si l’AES venait à créer sa propre monnaie, celle-ci risquerait de subir le même sort. Les économies du Burkina Faso, du Mali et du Niger reposent principalement sur l’agriculture et l’extraction de matières premières, deux secteurs soumis à de fortes fluctuations des prix internationaux. En l’absence de diversification économique, une monnaie locale pourrait rapidement perdre de sa valeur face aux devises étrangères, aggravant les inégalités sociales dans ces pays déjà légendaire pour la pauvreté des habitants.
Pour que leur discours souverainiste soit crédible, les membres de l’AES doivent montrer qu’ils sont capables d’agir en cohérence avec leurs principes. Ils doivent donc incarner une véritable rupture avec les modèles qu’ils dénoncent en créant leur propre monnaie.

Pierre MATCHOUDO

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