Accumulation des Postes Ministériels au Bénin : Une pratique à interroger

Au Bénin, comme dans plusieurs pays africains, l’accumulation des postes ministériels par une seule personnalité politique est une pratique récurrente. Certains ministres se retrouvent à la tête de plusieurs départements, cumulant des responsabilités parfois très éloignées les unes des autres. Si cette tendance peut s’expliquer par des raisons politiques ou techniques, elle soulève des questions sur son efficacité réelle.
Entre surcharge de travail, dilution des compétences et risques de mauvaise gouvernance, faut-il voir dans cette pratique une norme à questionner ? Au cours des dernières années, plusieurs ministres béninois ont cumulé des portefeuilles importants. Par exemple : Véronique Tognifodé, Ministre des Affaires sociales, gère également le Ministère de l’Enseignement secondaire et de la Formation technique et professionnelle depuis le décès tragique de son collègue. Et désormais Didier José Tonato qui prend les rênes de trois ministères clés, à savoir : le Ministère du Cadre de Vie et du Développement Durable, le Ministère des Transports et le Ministère de l’Énergie, de l’Eau et des Mines. Alors que Kokou Lanan William Karmen Kodjoh-Kpakpassou, Secrétaire général adjoint du Conseil supérieur de la Magistrature, occupe simultanément le poste de présidente de la Cour d’Appel de Commerce souligne Matin Libre dans sa publication du 4 avril 2025. Sans compter évoque la même source que Cyrille Gougbédji, membre de la Délégation à l’éthique et au contrôle dans l’enseignement supérieur, est également deuxième Secrétaire général adjoint du Gouvernement. S’il y a bien un cadre dont la polyvalence défie les normes administratives, c’est Moïse Achille Houssou écrit le même canard. En plus d’être Directeur général de Simeau SA et de son rôle au Bureau d’Analyse et d’Investigation (BAI), il est aussi officiellement à la tête de l’Agence nationale de promotion des patrimoines et du développement touristique (Antp), dont le recrutement d’un Directeur général n’a été lancé qu’en février 2025 !Il en a plusieurs d’autres cas. Ce qui prouve avec aisance que l’administration Talon semble fonctionner sous le règne du cumul et des intérims prolongés.
Les justifications avancées
Certains affirment déjà que cette accumulation n’est pas nouvelle, mais elle semble s’être accentuée sous les gouvernements récents, notamment sous l’ère Talon, où certains profils sont sollicités pour leur expertise ou leur loyauté politique. En effet, les partisans de cette pratique mettent en avant la recherche d’efficacité c’est-à-dire un ministre expérimenté peut mieux coordonner des secteurs liés (ex : Économie et Plan). La stabilité politique à savoir confier plusieurs postes à une personnalité de confiance réduit les risques de conflits internes et les économies budgétaires ce qui signifie que moins de ministres signifie moins de dépenses en salaires et avantages. Cependant, ces arguments sont-ils réellement vérifiables ?
Car pour certains experts de la chose administrative, un ministre qui cumule plusieurs portefeuilles peut vite se retrouver débordé. La gestion d’un seul ministère évoque exige déjà une disponibilité totale, avec des dossiers techniques, des réunions interminables et des déplacements fréquents. Ce qui soulève la question de savoir : Comment assurer un suivi optimal de plusieurs départements en même temps ? Des études en management public (OCDE, 2018) montrent que la surcharge administrative réduit la qualité des décisions. Au Bénin, certains ministères cumulés (Santé + Éducation, par exemple) ont connu des retards dans la mise en œuvre des politiques, faute de disponibilité des responsables. Un ministre confie Georges, administrateur n’est pas forcément expert dans tous les domaines qu’on lui confie. Par exemple dit-il qu’un « ministre de l’Agriculture cumulant celui de l’Environnement peut maîtriser les deux sujets. Mais un ministre de la Justice chargé aussi des Transports aura plus de mal à arbitrer des dossiers techniques. Ce qui dénote que les décisions peuvent être prises par des conseillers ou des technocrates, réduisant la responsabilité politique directe ».
Quelles solutions pour le Bénin ?
-En France, la loi interdit à un ministre de cumuler plus de deux postes exécutifs. C’était le cas au Sénégal, sous Macky Sall, une rationalisation des portefeuilles a été engagée pour éviter la dispersion. Idem au Rwanda où Paul Kagame a réduit le nombre de ministres pour améliorer l’efficacité. Ces pays ont compris que trop de cumuls nuisent à la bonne gouvernance.
Le Bénin gagnerait donc à s’inspirer des bonnes pratiques internationales pour optimiser l’action gouvernementale. La question n’est pas de remettre en cause la compétence des ministres, mais de garantir que chaque département soit piloté avec l’attention et l’expertise qu’il mérite. Et pour cause, l’accumulation des postes ministériels au Bénin, illustrée par plusieurs cas, n’est pas anodine. Si elle peut se justifier par des impératifs politiques, elle nuit à l’efficacité de l’action publique et à la transparence démocratique. Il est temps d’ouvrir le débat sur une réforme encadrant cette pratique, pour une meilleure répartition des responsabilités au sein du gouvernement.
LA REDACTION